Je n'ai absolument rien à dire, si ce n'est que si, en fait si, mais non, rien.

Je n'en PEUX PLUS d'être semi-active, je suis exactement dans le même état que l'année dernière à la même période. Je vais finir par sauter partout en hurlant "Employez-moi, employez-moi", tant j'en ai assez de n'agir qu'à moitié. J'en ai un ras-le-bol terrible de ces papiers que j'attends, de ces autorisations que j'attends, de ces débuts de cours que j'attends, de ces confirmations que j'attends, j'attends tout, tout le temps.
A chaque fois, c'est un, plus un, plus peut-être un, plus un, ah mais non en fait c'est moins deux, parce que ci et ça, vous comprenez, ah finalement plus un, just wait please, encore quelques jours, plus un... Des petites activités, des petites choses à ranger, des petits tâches à faire, puis de gros blocs d'instrument à travailler, de babysitting, puis plus rien, néant. J'attends. J'en ai marre, marre, marre.
Parce que tous ces 1+1+1+1+1 ne me permettent pas de me dégager de grandes plages de temps libre que je pourrais utiliser pour faire des choses qui prennent vraiment du temps, comme organiser une GRANDE sortie (en tout cas plus grande qu'une scéance à la va-vite au ciné du coin) aller me voir un musée pendant TOUT un après-midi (ça fait depuis juin que je n'y suis pas allée, ça commence à me manquer), passer un VRAI LONG moment avec des amis, ou faire INTENSEMENT les magasins. Bon, oui, ce ne sont presque uniquement que des choses futiles, à 90%, je vous le concède. Mais qu'est-ce que j'en ai besoin!

En fin de compte, je passe la moitié de mes journées à marcher, ou dans les transports en commun. Pour telle inscription, pour aller au marché (wahou), pour aller à tel cours d'une heure seulement au conservatoire, et encore, ça débute tout juste, pour aller recueillir telle information, pour aller chercher tels enfants dans telle école. Petit, petit, petit, petit, PETIT!!!!

Si j'aspire tant à ces immenses sorties, à ces grandes plages de temps, c'est parce que je me sens profondément inutilisée. Utile, oui, puisque j'emploie mon temps à aider à la maison, ou à travailler mes instruments (mais pas assez ; actuellement, je n'arrive pas à faire plus que des tranches d'une heure et demie, sans parvenir à retravailler durant la journée). Mais non-employée. J'ai BESOIN d'aller en cours, que l'on me dise : "Ca y est! Tu es débordée, vraiment débordée, tu as des cours partout, du travail partout, des disserts!". J'ai besoin que l'on me demande de REFLECHIR, d'AGIR, besoin d'être OBLIGEE. J'en ai tellement besoin que j'écris tout cela en capitale... Il faut que je sois surbookée. Là, ce n'est que du 50%-50%, 50% obligations diverses, 50% temps mort, mais tellement mal réparti que je n'ai ni la sensation d'être active, ni la sensation d'avoir du temps.

C'est usant Ca peut paraître absurde, mais c'est très usant.
J'en ai assez d'être entre-deux, d'avoir une heure de cours de flûte le matin, puis un grand temps vide durant lequel je fais un peu de piano, un peu de lecture, un peu de cuisine, un coup de fil, puis deux heures de babysitting qui me vident complètement, puis je retravaille mon piano, et hop, fin de la journée.
J'ai alors le sentiment, à la fois d'avoir fait beaucoup de choses, et à la fois de n'avoir strictement rien fait. Puisque TOUS les jours, je fais du piano, de la cuisine, du jardinage, de la lecture, de la flûte.

En fait, voilà, j'ai envie de hurler : "CHANGEMENT!!!" en agitant les bras partout, de sauter comme un gorille sur le canapé du salon en balançant des formulaires d'inscription, de courir dans la rue en chantant des chansons paillardes, d'entrer dans la fac et de voir débouler une armée de profs qui me diront : "Feu, au travail!"
Pitié, du travail. Je veux ne plus avoir une seconde de libre durant le semaine, pour pouvoir ensuite profiter pleinement d'un VRAI après-midi libre, entier, du début à sa fin, pour faire ce que je veux. Pas une petite moitié mesquine d'après-midi, entrecoupée d'une petite course au Framprix du coin, d'une éventualité de baby-sitting, d'un presque-ceci ou pas-tout-à-fait-celà.

EMPLOYEZ-MOI!!!!!!!!!!!!!!!!!
DU TRAVAIL, PAR PITIE!!!!!!!!!!!!!!!!
Je VEUX des dissertations!!!!!
Je veux que mon cerveau réfléchisse jusqu'à en fumer, je veux que mes neurones s'activent jusqu'à en avoir mal, je veux écrire tant que mon poignet triplera de volume et que mes yeux me piquent, je veux travailler, travailler, travailler, jusqu'à ce que je parle toute seule dans la rue avec un air absent, récitant sans m'en apercevoir des bouts de cours et de textes, qui sortiront tous seuls de ma bouche comme de la bave des lèvres d'une limace. (et encore, les limaces bavent-elles, là est la question)

Tout à l'heure, dans le bus, je me suis appris quelques vers d'Appolinaire. C'était limite si je n'avais pas atteint l'extase, tant j'étais heureuse de donner de quoi se repaître à ma matière grise.
Chaque jour est sujet à de nouvelles trouvailles pour réveiller mon cerveau endormi. Parce que naturellement, comme je suis formidablement emmerdante, la nouveauté de la veille ne me suffit plus le lendemain, sous peine d'être assommée par la monotonie dans laquelle je m'englue.
Car j'en vois déjà qui me diront : Mais, ne peux-tu pas lire des romans, des ouvrages pointus, t'avancer dans ton programme de l'année à venir, relire tes cours de l'an passé, écrire des histoires, des lettres, faire des mots croisés, t'inventer des casses-tête, faire des listes d'idées, t'abreuver dans les bibliothèques... pour activer ta matière grise?
Mais voilà, le drame, c'est que tout ça, je l'ai DEJA fait.
Bon, oui, je n'ai pas relu tout mon cours de l'année dernière, et je ne me suis pas avancée sur tout le programme de l'année à venir, bien évidemment, sous peine de devenir un véritable cerveau-rat-de-bibliothèque-psychopathe, ce que je n'aspire pas du tout à devenir.
Mais j'en ai tout de même pas mal fait. Je me suis même abrutie à faire des jeux de cartes électroniques sur mon ordinateur, entre deux activités-qui-prennent-tout-mon-temps-mais-pas-tout-à-fait, en-tout-cas-suffisamment-assez-pour-me-fatiguer-mais-suffisamment-peu-pour-m'user-les-nerfs-à-attendre.
C'est dire.

Alors, mflsdkhjglkmhqhffS, vivement le moment où je pourrai gambader joyeusement en direction de ma fac chérie, crouler sous le boulot (hum, j'allais oublier que je suis à la fac, donc je me reprends : crouler sous les sorties?? Non, n'exagèrons rien. Boulot. Boulot. Je veux du bouuuuuulot.), et voir mon emploi me faire des journées de six heures du matin à minuit et plus, et m'apercevoir que mince, les journées n'ont que 24 heures.

Haha !!!!!! !!!!!!! !!!!!!!

Je deviens cinglée. EMPLOYEZ-MOIIIIIIIIIII !!!!

A part ça, en ce moment, je me bourre de barres vitaminées à l'abricot et aux protéines (comme si les protéines étaient un ingrédient de barres vitaminées au même titre que l'abricot, ah, ah)(en plus ça n'est pas drôle du tout, pourquoi ris-je??), et c'est très bon. C'est absolument idiot, car j'ai encore plus l'impression d'avoir de l'énergie à revendre, non utilisée. Mais peu importe. Je lis Alcools d'Apollinaire pour compenser, et oh, qu'est-ce c'est beau. Comment ne pas aimer cette plume :

Soirs de Paris ivres du gin
Flambant de l'électricité
Les tramways feux verts sur l'échine
Musiquent au long des portées
De rails leur folie de machines

Dans mon inactivité-surbookée, je fais des listes. Des listes de choses à faire, des listes de courses, des listes de citations, des listes d'idées philosophiques, des listes de bouquins à lire, des listes de plats cuisinés, des listes de cadeaux à offrir. Le seul truc, c'est que je me rends compte que dans 90% des cas, ces cadeaux sont ceux que j'aimerais me voir offrir. Alors, à côté, j'écris : "Cadeaux à offrir (à moi-même)". Hum.

-En fait, voilà, c'est ça, j'ai trouvé : j'ai besoin de DIRECTIVES.-

Ces cadeaux vont du dernier CD de Noir Désir (un live, en plus, ouhlala), à un séchoir en forme de pistolet de chez Why, en passant par des moules à cannelés (il me faut absolument des moules à cannelés, les cannelés étant, comme chacun sait, la meilleur chose du monde), un énorme bonbon de 1kg avec son marteau que j'ai reperé dans je-ne-sais-plus-quel-catalogue, un bouquin de photographies de mains d'Anne de Vandière intitulé Hands, et d'autres choses plus ou moins inutiles, comme des magnets avec des mots dessus, et le DVD des Indes Galantes de Rameau, par William Christie et les Arts Florissants.
Bonne âme, si tu passes par là...

Uhuhuh.