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Le temps passe, le souvenir reste. Malgré soi, parce que soi.

"Que mon coeur, chère Ismène, écoute avidement
Un discours qui peut-être a peu de fondement!"

Je me rappelle ma classe de seconde...

"...Ô toi qui me connais, te semblait-il croyable
Que le triste jouet d'un sort impitoyable...

était là. Dans la salle, à un bout. Moi, à l'autre.

"... Un coeur toujours nourri d'amertume et de pleurs…" 

Phèdre de Racine. Aricie, acte II, scène I…

"…Dût connaître l'amour et ses folles douleurs ? " …

Qu'y a-t-il de plus terrible et délicieux que de par sa bouche sentir les mots de l'auteur qui passent, et qui prennent soudain une signification toute particulière destinée à un autre?

"...Tu sais que de tout temps à l'amour opposée,
Je rendais souvent grâce à l'injuste Thésée,
Dont l'heureuse rigueur secondait mes mépris."...

Lentement l'on devient investi du personnage, ce que l'on songe à dire depuis si longtemps est accessible...

"... Mes alors, mes yeux n'avaient pas vu son fils."

On tremble à l'idée de prononcer ce qui couve en soi, ces mots si douloureux à porter, si agréables à penser, et si ardus à dire.

"... Non que par les yeux seuls lâchement enchantée..."

Je sentais son regard posé sur moi.

"... J'aime en lui sa beauté, sa grâce tant vantée,
Présents dont la nature a voulu l'honorer..." (...)

Lorsqu'enfin ces simples mots atteignent les lèvres et prennent le chemin de la voix, plus rien n'existe.

"... Je l'aime, je prise en lui de plus nobles richesses,
Les vertus de son père, et non point les faiblesses..."

Ce n'est plus soi, c'est le tréfond de soi-même qui soudain parvient au grand jour. Une voix qui nous semble tout autre parle, ce qui était caché prend forme, devenant son, audible, et ce n’est en fait que nous, notre partie la plus intime qui s’exprime enfin, non plus seulement en nous-même, par l’imagination, mais vers l’extérieur, la personne aimée.

" Je l’aime, je l’avouerai, cet orgueil généreux
Qui jamais n’a fléchi sous le joug amoureux… "

Comme habité par une autre, par un personnage de théâtre inconnu à soi, c’est plus que jamais notre moi intime qui parle.

Sans doute un des plus beau moments de mon existence.

Et je le savais là, juste à côté, à quelques mètres. Il me voyait, et je le devinais, dans le coin au fond, sur ma gauche, je ne parlais que pour lui, ce texte ne pouvait être fait que pour moi et lui, tout autre qui l’aurait lu, prononcé, ne pouvait que le souiller, par une voix qui, elle, ne frémissait pas d’amour, ne portait pas en elle toute la crainte, le bonheur, la douleur et la joie mêlée, qui peuvent seules sortir de quelqu’un qui aime.

(…) « …Hippolyte aimerait ? Pas quel bonheur extrême
Aurais-je pu fléchir… »

A ce moment-là, j’ai cru mourir. J’ai levé la tête, comme poussée par une force autre, vers lui, alors que les derniers vers expiraient dans ma bouche. J’ai rencontré ses yeux, fixés.

En sortant du cours, j’étais encore tremblante, émue, comme si une partie de moi était complètement à nu, je me sentais vulnérable. Il m’a frôlée en passant par la porte, a fait quelque pas, s’est retourné, je me suis arrêtée, il m’a regardée durant l’espace d’une seconde qui ne s’arrêtait pas – je n’oublierai jamais ce regard – et est parti.

 

Ah, nostalgie… C’est un beau souvenir. D’une histoire inachevée-qui n’a jamais commencé. Peut-être est-ce mieux comme cela.
Le souvenir de cet inachèvement reste, comme une douleur que l’on aime. Comme la photgraphie de quelqu’un en pleine course, au moment où il s’apprête à sauter par-dessus une barrière, mais semble dévier sur le droite, pour contourner, peut-être. Mais sur la photographie, il ne le fait pas. On ne sait s’il a sauté, s’il a contourné. L’aurait-il fait ? Nul ne le saura.

Le souvenir reste. 

Ecrit par Feu, le Samedi 18 Septembre 2004, 20:06 dans la rubrique Ecrits.

Inspirations soudaines :

Etolane-Lantrec
Etolane-Lantrec
18-09-04 à 21:24

il est beau cet article, même si j'ai eu un pincement au coeur en le lisant. La vie c'est un peu comme ça: on ne s'est pas si on sautera les obstacle où si on se prendra les pieds dedans pour s'étaler de tout son long, le coeur en miettes...perso, ça me fait peur.

Bizoox,

Ann.


 
Feu
Feu
19-09-04 à 14:26

Re:

C'est vrai que c'est effrayant, mais en même temps c'est ça qui la rend belle, cette vie... Cette part de danger qui est juste là, au tournant, et qu'on se fait un plaisir d'admirer et d'éviter.
Je crois que je préfère ne pas savoir, qu'au contraire voir mon avenir tout prédit, même si moi aussi, ça m'effraie un peu!


 
Antigone
Antigone
18-09-04 à 23:10

J'avais aussi lu Phèdre en seconde, mais c'était plutôt au personnage de Phèdre que je m'identifiais. C'était un peu pareil que ce que tu racontes.

Sinon, pour les images, je crois que si ça dit "Not found", c'est probablement parce que tu as du mal recopier l'url de l'image.
Par exemple si je voulais insérer dans mon commentaire une des images qui sont chargées sur ton joueb, d'abord je regarde qu'est-ce qu'il y a dans ton répertoire images :
http://feu.joueb.com/images
On peut prendre la photo de Ionesco ; l'url de l'image, c'est ça : http://feu.joueb.com/images/Ionescoo.jpg
Pour l'insérer avec le code, il faut faire : <img src="URL de l'image"></a> . Si c'est dans un article, il faut désactiver l'éditeur visuel, en cliquant sur le bouton <>
Sinon avec l'éditeur visuel, tu cliques sur l'icone avec l'image.
Tu remplis pour l'URL, tu cliques sur Preview, histoire d'être sûre que l'URL est la bonne. Après tu peux rajouter une légende à l'image. Et pour les autres trucs, je laisse vide, personellement.

Et voilà, ça marche.

J'espère que cette fois ça va marcher...



 
Feu
Feu
18-09-04 à 23:27

Re:

Ca marche!!!!!!! Ca marche ça marche ça marche.... Ca MARCHE!!!

Merci mille fois! En fait, il suffit de laisser un espace entre les mots du titre de l'image, je croyais qu'il fallait mettre un underscore !

Merci Antigone... ;)Merci merci merci!

PS : au fait, tu aimes les auteurs de l'absurde? (Beckett, Ioneco, Anouilh?)
re-PS : à part cela, pour ma part je m'identifiais aussi bien plus à Phèdre ; elle est plus ramifiée, plus complexe ; c'est juste cette lecture à voix haute en classe qui m'avait particulièrement marqué...


 
Antigone
Antigone
18-09-04 à 23:30

Re:

Oups, je me suis trompée à un moment....
J'avais écrit : Pour l'insérer avec le code, il faut faire : <img src="URL de l'image"></a>
Ce qui est barré est faut, en fait c'est : <img src="URL de l'image"/>

Un bon conseil pour comprendre comment on fait pour coder une page web, c'est de regarder : Clic droit sur une page, afficher la source.
Par exemple si tu fais ça sur la page de mon ancien joueb, comme elle est très simple, tu arrives tout de suite à voir comment faire pour afficher un lien sous forme d'image, afficher un lien vers un mail, et enfin afficher une image.

 
Schussss
Schussss
19-09-04 à 00:09

Bel article...très bel article.

 
Feu
Feu
19-09-04 à 14:26

Re:

Merci beaucoup Schusss!

 
Guy-muses
Guy-muses
19-09-04 à 16:58

Re: Re:

"comme une douleur que l’on aime" Tu la ressens toujours quand tu te promènes dans la nuit et que tu repenses à lui?

 
Feu
Feu
21-09-04 à 18:05

Re: Re: Re:

Quand je suis un peu triste et que j'y repense, parfois, oui. Mais bien sûr, pas aussi forte qu'elle a pu être. Sourde, faible, mais présente quand elle reparaît.